L’abbaye de la Réau, un patrimoine à sauver – VIENNE
Après l’abbaye de Saint-Savin et Montmorillon nous poursuivons nos aventures dans le sud du département de la Vienne et je vous emmène découvrir un monument à sauver : l’abbaye de la Réau !
Cette abbaye fait partie des trésors cachés du département, un trésor souvent méconnu mais qui mériterait bien un détour que ce soit pour faire une plongée dans le temps et revivre à l’époque des moines ou bien aider à sauver un monument qui nécessite des fonds pour son entretien et sa consolidation.
Suivez-moi et remontons le temps à
l’abbaye de la Réau !
Localisation
L’abbaye de la Réau se trouve dans le département de la Vienne, sur la commune de St Martin-l’Ars (à 3 km du centre-ville), à 50 km au sud de Poitiers, à 80 km au Nord-est d’Angoulême et à 80 km au Nord-ouest de Limoges.
Elle a été établie le long de la rivière du Clain qui coule également à Poitiers. Notre-Dame de la Réau occupe une place très honorable parmi les grands monastères fondés en France au Moyen Âge.

Sur les bords du Clain
HISTOIRE
La fondation de l’abbaye et sa fortification
Fondée au XIIe siècle sous la protection d’Aliénor d’Aquitaine, l’abbaye a été établie aux confins du Poitou et de la Marche dans un lieu assez reculé pour qu’une communauté de chanoines puisse y vivre conformément à la règle établie par Saint Augustin.
Très influente au XIIIe siècle, l’abbaye connaît un développement considérable et sera fortifiée pendant la guerre de Cent Ans. Au XVIe siècle le monastère tombe peu à peu dans l’oubli, affaibli par les guerres de religion qui précipitent l’abbaye dans une ère de déclin. L’abbaye est à l’abandon, les moines vivent comme des petits rentiers, sans guère plus de sentiments religieux, chacun avec son petit bénéfice particulier. En 1616, Louis XIII fait don de La Réau à François de la Rochefoucauld.
Du renouveau au déclin, des siècles
En 1653, son neveu Louis, réforme l’abbaye en passant un concordat avec l’abbaye de Ste Geneviève, pour revenir à une plus grande rigueur dans la vie monastique. Après lui, on retombe dans le cycle des abbés insouciants parmi lesquels Claude Séguin, médecin d’Anne d’Autriche qui se fit prêtre, et Arnaud d’Artagnan, le frère du fameux mousquetaire. Ces abbés étaient assez éloignés de la rigueur d’un monastère et l’un d’eux se fit même construire un logis face à l’abbaye.
Après un long déclin il faut attendre le XVIIIème siècle, pour qu’un programme de reconstruction rende son éclat à l’abbaye mais cela sera de courte durée puisqu’à la Révolution, l’abbaye est vendue comme bien national et l’église est démantelée. Au XIXe, l’abbaye est transformée en demeure privée.
L’abbaye aujourd’hui, un monument à sauver
En 1941 elle est cataloguée par les historiens comme « l’un des plus hauts-lieux du patrimoine du Haut-Poitou » et de ce fait elle est classée Monument historique. Ce classement n’empêche pas l’abbaye de se détériorer. Elle est vendue en 2016 aux actuels propriétaires qui sont tombés totalement amoureux du site qu’ils ont d’abord découvert en photo.
Michel Guyot et sa compagne Noémi Brunet voulaient absolument sauver ce monument et qu’il garde son souffle monastique. Propriétaires du château de Saint-Fargeau, dans l’Yonne, le maître de maison, un amoureux du patrimoine et des défis, est également à l’origine du chantier médiéval de Guédelon où, depuis 20 ans, se construit ex-nihilo un château-fort selon les techniques du Moyen Âge.
L’aventure était belle pourtant et le pari un peu fou : remettre en état une abbaye classée et la rouvrir au public pour en faire un site touristique à part entière dans le département. Seulement, le seuil des 10 000 entrées, indispensable pour faire face aux charges fixes, n’a jamais été franchi : 8 000 visiteurs en 2017, 5 000 en 2018 (malgré le succès de la grande fête organisée en septembre).
Quel avenir pour l’abbaye ?
Les propriétaires qui étaient tombés amoureux du lieu ont dû se rendre à l’évidence, entretenir cette abbaye coûte très cher et ils ont déjà beaucoup de travail avec leurs autres projets c’est pourquoi ils viennent de remettre en vente l’abbaye. Une vingtaine d’acquéreurs potentiels ont pris contact. Affaire à suivre !
A noter : L’abbaye a été retenue pour bénéficier du loto du patrimoine organisé par Stéphane Bern, elle a bénéficié d’une aide de la Mission Bern de 22 000 €.
Visiter l’abbaye
Nous sommes arrivés à l’abbaye en début d’après-midi, à temps pour un agréable pique-nique à l’ombre avec Harry.
Dès que l’on arrive sur le site on est frappé par sa tranquillité. Durant le repas nous n’avons entendu aucun bruit, si ce n’est le champ des oiseaux et quelques abeilles qui butinaient les fleurs autour de nous.
Nous avons mangé avec la vue sur l’abbaye, le logis de l’abbé et le chemin de St Jacques de Compostelle qui passe à proximité du site.
En arrivant sur le site nous avons été accueillis par une bénévole, passionnée par l’histoire de l’abbaye. La visite est libre mais avant de démarrer la visite elle nous a présenter le lieu, son histoire et répondu à nos questions avec passion et gentillesse.
Le jour de notre visite il n’y avait pas grand monde, au mieux une famille de 3 personnes. Nous étions donc presque seuls pour profiter de ce cadre magnifique.
L’abbaye s’est établie dans un lieu reculé et sur les bords de la rivière : le Clain. Les moines avaient canalisé le cours d’eau aux abords de l’abbaye pour l’utiliser pour actionner un moulin.
Nous suivons les indications données à l’accueil et prenons la direction d’une petite porte à gauche (pas la première mais la deuxième) pour démarrer notre visite, accompagnés du plan. Nous passons devant l’imposante tour à machicoulis du XVe siècle et qui témoigne de la fortification du site. C’est dans cette tour qu’a été installée la petite chapelle que je vous présenterai plus loin.
L’entrée
Nous entrons dans la première pièce et là c’est la surprise ! Après l’abbaye de Saint-Savin, visitée quelques jours auparavant, je m’attendais à retrouver la même ambiance à l’intérieur des bâtiments monastiques : de la pierre de la région sur les murs, des éléments romans et de la sobriété. Au lieu de cela nous découvrons des petits salons privés et des boiseries (en mauvais état).
Le salon au rez-de-chaussée
Les premiers pas à l’intérieur du bâtiment sont des plus étonnants ! On a plus l’impression d’être dans un château du XVIII-XIXe, laissé en l’état, que dans une abbaye.
Tout est resté là : miroirs, chandeliers, fauteuils, tapis… et des livres !! Des centaines de livres sur les tables, les bibliothèques, certains ouverts et d’autres fermés comme si le propriétaire du lieu était simplement parti se promener et qu’il allait apparaître dans le coin d’une porte.
Dans le couloir du rez-de-chaussée
Dans chacune des pièces les propriétaires ont imaginé un parcours pour plonger dans l’univers monastique du XVIIIe siècle. Même dans le couloir du rez-de-chaussée on retrouve des livres ouverts et une veste posée sur une chaise, veste qui laisse penser que l’abbé va revenir s’asseoir à sa table d’ici peu.
Les latrines et le trousseau du moine
La bibliothèque
La salle capitulaire
Parmi les plus belles pièces de l’abbaye il y a la salle capitulaire du XIIe siècle avec ses voûtes basses (époque romane). Cette pièce est le lieu où l’on discute de toutes les affaires de la communauté : les questions touchant l’organisation matérielle du monastère, l’élection des abbés, la réception des hôtes de marque et les questions de discipline communautaire.
Dans cette magnifique salle capitulaire romane n’oubliez pas de jeter un œil aux cul-de-lampe sculptés représentant d’étranges masques.
Le réfectoire
Le réfectoire est la salle à manger où les membres d’une même communauté religieuse prennent leur repas ensemble. Habituellement les réfectoires sont de très grandes dimensions afin de pouvoir accueillir toute la communauté en même temps.
Les tables sont alignées le long des murs et les moines se placent côte-à-côte de manière à n’avoir aucun vis-à-vis entre eux et à être tous tournés vers l’intérieur de la salle. L’abbé préside le repas sur une table particulière qu’il partage avec les dignitaires.
La scénographie nous permet de voir comment mangeait un moine à l’époque. Les religieux prenaient deux repas par jour dans un silence des plus total, sauf les jours de fête. Pour pouvoir discuter entre eux les moines avaient mis au point toute une gestuelle.
Les rencontres dans les couloirs
Déambuler de pièce en pièce est la meilleure façon de découvrir les bâtiments et la vingtaine de pièces aménagées pour revivre la vie monastique. Mais, attention aux rencontres que vous pourrez faire dans ces lieux… (surtout le monsieur à droite en dessous 😉 ahaha )
La cuisine
Direction le premier étage
Après la visite du rez-de-chaussée nous empruntons l’escalier pour rejoindre le premier étage et les cellules des moines.
Les cellules des moines
Au premier étage nous arrivons dans un vaste couloir qui dessert les cellules des moines. Chaque pièce a été aménagée : l’infirmerie, la lingerie, le scriptorium, la pharmacie… On a vraiment l’impression que rien n’a bougé depuis des siècles.
L’infirmerie et la pharmacie
Nous passons de pièce en pièce et découvrons l’infirmerie et la pharmacie. Tout est posé là et n’attend plus qu’un malade à soigner. Je vous avoue que je ne me porterai pas volontaire pour tester les techniques de l’époque… sur le mur plusieurs conseils de santé nous font sourire. Par exemple : « pour conserver les dents, il suffit de les laver deux fois par mois avec du vin dans lequel aura bouilli une racine de thym » (pas sûr que cela fonctionne mais d’accord pour le vin deux fois par mois !).
La lingerie
La salle de bain
Les chambres
la chambre rouge
La chapelle installée dans la tour
Le scriptorium
La vue sur le jardin et sur l’accueil
L’escalier monumental
Retour à l’extérieur
À l’extérieur, vous pourrez contempler les ruines de l’abbatiale, les traces du cloître aujourd’hui disparu et les différentes maçonneries pour comprendre les transformations depuis le XIIe.
La tour de défense à droite de l’église
La grange
Le pigeonnier
Un petit coin de nature
Informations pratiques
Horaires :
Avril, mai, juin et septembre : tous les jours 14h-18h.
Juillet et août : tous les jours 10h-19h.
Du 1er octobre au 4 novembre : week-ends et vacances 14h-18h.
Tarifs (pour financer les travaux et l’entretien) :
Visite libre 10 €, enfant 6 €.
Groupe 8 €, enfants 5 €.
En le visitant, vous participez au sauvetage d’un monument historique exceptionnel.
INSOLITE : Dormir comme un moine !
Pour ceux qui se laisseraient tenter sachez que vous pouvez passer la nuit à l’abbaye de la Réau, une nuit insolite où vous dormirez comme un moine, dans cinq cellules monastiques avec éclairage à la bougie et petit déjeuner simple et copieux dans le réfectoire. (rassurez-vous il y a tout de même de l’eau chaude, salle de bain et même le Wifi).
Si cette expérience vous tente, comptez 89 € (pour deux personnes avec le petit déjeuner) + visite de l’abbaye offerte !
Plus d’informations : Dormir comme un moine
Ouverte depuis 2017 au public il ne vous reste peut-être plus que quelques semaines pour pouvoir visiter cette abbaye qui viendrait d’être rachetée (aux dernières nouvelles). Les nouveaux propriétaires envisageant de lourds travaux elle ne sera peut-être plus accessible au public après cet été.
Pour voir ou revoir les articles sur le département de la Vienne
rendez-vous dans la rubrique
POITOU-CHARENTES
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Ce reportage n’est pas issu d’un partenariat mais vient agrémenter un
reportage avec l’Agence de Créativité et d’attractivité du Poitou.
C est magnifique !
J aimerais beaucoup venir
Je suis un a amie d enfance de Noemi; sera t elle là cet été ?
Merci de lui transmettre mes amitiés
Bonjour,
Je ne sais pas si Noemi lira votre message ni même si elle sera là cet été 🙂
Bel été à vous
Magnifique ce que vous avez fait. Je connais cette abbaye. Mes grands-parents habitaient dans un village à côté et ma maman et ses frères et soeurs) allaient à la messe dans la chapelle quand ils étaient petits). Un endroit extrêmement paisible et que j’adore.
Bonjour Fabienne et merci pour votre message.
Je suis heureuse que ce petit article sur l’abbaye vous ait plu ! Cela doit vous rappeler de bons souvenirs.
Bel été à vous,
Anaëlle
Très bel article. Belles photos